Contexte et Environnement
Date et Heure de l’incident:
Jeudi 13 Juin 2024, 13:51
Dommages corporels (oui/non, lesquels, interruption temporaire de travail) ? :
Surveillance en soins intensifs (4j) pour polytrauma, dont pneumothorax.
Hospitalisation (10j) pour opération chirurgicale sur cervicales C5/C6.
Port de minerve intégrale (6 semaines) pour reconstitution des cervicales C1/C2.
Arrêt de travail de 1,5 mois (qui aurait pu se prolonger).
Aujourd’hui (accident +4 mois): lésion du plexus brachial entraînant incapacité partielle, peut-être temporaire (mais peut-être seulement), des bras gauche (handicap faible) et droit (handicap fort).
Dommages matériels (oui/non, lesquels) ? :
Sans (autre que voile).
Le pilote a dû faire une déclaration auprès de la FFVL (oui/non) ? :
Oui
Niveau du pilote : (Heures de vol par an en moyenne ? Années de pratique ? Quel brevet ?
7 années de pratique (BI en 2017)
75h à 100h par an (depuis 2022)
BPC (Avril 2021)
QBi (Sept. 2023)
Compétiteur depuis 2023
Deux SIVs (en 2021 et 2023)
Type de matériel (ex : voile EN A, révisée ou non, année, sellette cocon, etc…) :
Gin Bonanza 3 XS (EN-C, 2 lignes) - allongement 6,3
Achetée neuve en Mai 2023, 82h de vols avec
Révision & calage prévus (mais non réalisés).
Stay-up (première génération). Parachute ventral (déjà ouvert et testé en SIV).
Volume de pratique dans les 30 jours précédents l’incident (heures de vol et de gonflage)? Avec le même matériel?
15h de vol. Pas de gonflage.
Type de vol (ex : Solo, Bi, etc.) :
Solo
Phase du vol (ex : Prévol, Décollage, vol, Approche, Atterrissage, etc.) :
Vol de cheminement.
Lieu (ex : sur site (lequel), en cross, plaine, montagne, etc.) :
Ager, Catalogne, Espagne.
Déclarant (pilote, passager, témoin …) ?
Pilote
Nombre et type de personnes concernées (ex : 1 pilote + passager, 2 pilotes, etc.) :
1 pilote
Environnement (ex : obstacles, densité de voiles, nature du sol, etc.) :
Trafic modéré, sans gêne d’autres pilotes. Vol de cheminement (depuis déco) vers l’Est.
Météo et aérologie (ex : vent fort, conditions thermiques, orientation du vent, etc.) :
Conditions aérologiques modérées (pas toniques, plutôt agréables). Temps nuageux, petits cumulus ne présentant aucun caractère/risque de surdéveloppement. Orientation annoncée Ouest (peu habituelle pour le site) mais brise de vallée établie et dominante (comme souvent à cette période de l’année et à cette heure de la journée).
Le pilote avait -il conscience d'être dans une situation à risque ?
Non bien qu’à faible hauteur sol (moins de 150m AGL).
Par ailleurs, bonne connaissance du site.
Le pilote était-il dans un état d'esprit ou une condition physique particuliers ? (fatigue, stress, excès de décontraction, etc.)
Non (pas plus, pas moins fatigué qu’avant toute période estivale).
Condition physique satisfaisante pour la pratique du parapente (gainage quotidien 30 minutes).
Dîner de la veille sans alcool, comme c’est mon usage à chaque veille de vol.
Couché normal la veille (22h), bonne nuit de sommeil (hôtel calme, bonne literie).
Le pilote s'était-il fixé un objectif particulier pour ce vol (distance, durée, exercices etc...)
Parcours “compétition” (en pratique: un exercice informel avec balises) par ailleurs suivi par un groupe de TDS (encadré par EPVL/Cousinet). Parcours suivi sans aucune pression: décollage bien après le groupe, volonté de voler en décalé pour ne pas:1/ gêner les volants; 2/ interférer sur les instructions données.
L’objectif du jour: faire du temps de vol (2h minimum) en vue d’une compétition prévue le week-end suivant (i.e. deux jours après).
Le pilote a-t-il pensé qu'il pouvait utiliser son secours ?
Le geste d’ouvrir le secours était engagé au moment de l’impact sol.
Description de l'incident
Description chronologique des faits :
- Après une trentaine de minutes de vol “tranquille”, cheminement sur la crête au premier barreau (je n’utilise les plein-barreaux que très rarement, par exemple pour quitter une zone moisie, ce qui n’était pas le cas ici).
- Grosse frontale, intégrale, franche et brutale (comme en SIV au deuxième barreau)
- Réflexe “bras-hauts, bras-hauts” comme appris en SIV.
- Lorsqu’elle repasse au dessus, la voile est reconstruite… mais twistée (“merde, c’est pas bon ça: faut faire secours Alexandre”)
- départ en auto-rot, un tour (“Alexandre, faut pas traîner maintenant”)
- Engagement du geste (pour extraction du secours)
- Impact sol (avant extraction)
Le tout durant… une vingtaine de secondes (ressenti… confirmé par les instruments).
Analyse & synthèse du déclarant : à priori, quelles sont les causes de l’incident? :
Trace du vol sur XContest
Plusieurs causes possibles:
- Mauvais placement, trop proche du relief
Ca, c’est indiscutable (un peu moins de 100m AGL au moment de la fermeture frontale). Si seulement on pouvait toujours, en toute circonstance, voler avec (au moins) 300m sous les pieds…
Pour info!
“A Ager, les thermiques sont contraints et guidés par le vent météo le long des parois de la falaise. Lorsqu’ils arrivent à hauteur du plateau sommital, la contrainte disparaît et une détente horizontale se produit et génère des turbulences. Il est donc conseillé de ne pas voler en dessous de 100m AGL au-dessus du plateau, voire 200m si les thermiques sont forts.” (Jean-Paul Couzinet / EPVL)
- Mauvais placement, sous le vent du nuage?
Peu avant la fermeture, au moment d’initier la transition vers une balise placée autour du Pas del Llop (après Sant-Alis), deux options sont offertes:
a/ passer au vent d’un nuage qui, se déplaçant sur un axe Sud-Ouest/Nord Est, s’approche du relief… Cela m'aurait obligé à m’avancer vers la plaine et faire un assez gros détour.
b/ passer derrière le nuage.
Le nuage se déplaçant peu rapidement et étant encore à une bonne distance du relief (plus de 500m), le choix a été fait de l’option b.
- Mauvais placement, sous le vent du relief
La météo annonçait un vent d’Ouest. Le cheminement le long de la crête en direction de l’Est à faible altitude (un peu moins de 100m AGL si j’en crois mes instruments) m’a placé sous le vent de son sommet sans même que je ne m’en rende compte. Si j'avais cheminé dans l’autre sens (en direction de l’ouest comme sur la photo), ce relief sous le vent aurait été bien visible.
A cet endroit, le flux descendant (sous le sommet) entre en conflit avec la brise qui remonte les pentes pour créer une zone de cisaillement (voir ci-dessous). De plus, le thermique dans lequel j’étais en train d’entrer (+2,2 m/s au moment de la fermeture selon mes instruments) subissait, comme mentionné plus haut, une détente en arrivant au niveau du plateau, également susceptible de générer des turbulences.
- Adéquation Voile / Pilote
On peut considérer qu’une petite centaine d’heures de vols annuel est insuffisant pour voler en EN-C, encore moins sous une 2 lignes! C’est probablement un facteur aggravant. Une voile moins exigeante se serait peut-être reconstruite plus rapidement après la fermeture .
Quels conseils puis-je partager à la communauté pour éviter de reproduire cette situation dans le futur ?
- changez d’activité (je suis sérieux!!!) car le parapente est, et restera, un sport à risque (avez-vous envisagé le reste de votre vie en chaise roulante?)
- pour les drogués ne pouvant s’y résoudre (j’en faisais hélas partie): évitez à chaque fois que possible cette zone dangereuse à moins de 150 m AGL ; cette option était possible pour moi, elle l’est beaucoup plus souvent qu’on ne veut bien l’admettre!
- Méfiez-vous comme de la peste des orientations météo inhabituelles (Ouest pour le site d’Ager): vigilance maximale, prise de risque minimale.
- Ne précipitez pas vos changements de voile: mieux vaut être serein sous sa voile que stressé (ou dans mon cas: prendre des risques inconsidérés) en changeant de voile.